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(à la mémoire de Jules Dechène)

DE TOUS TEMPS, LE MONDE PHYSIQUE RÉEL ET LA BIOLOGIE ONT CONSTITUÉ DES CONTRAINTES NATURELLES S'IMPOSANT À L'HUMANITÉ ENTIÈRE. LEUR EXISTENCE CONDITIONNE aussi L'INSERTION SOCIALE DES PERSONNES MALADES. MAIS LES IDÉOLOGUES DE LA "SANTÉ MENTALE" LES OUBLIENT OU LES IGNORENT.

Si les savoirs scientifiques avérés sont négligés, voire ignorés, si les moyens matériels et humains correspondants et justement proportionnés aux buts de santé et de bien-être poursuivis ne sont pas mis en œuvre à bon escient, ALORS LES IDÉOLOGIES, MÊME SI ELLES SE VEULENT HUMANITAIRES, RESTERONT DES VŒUX PIEUX.

Des théoriciens idéologues, rêvant d'une fiction fourre-tout impossible tant à concevoir qu'à définir en pratique, qu'ils appellent "la santé mentale", sont volontairement aveugles aux réalités concrètes qui leur déplaisent dans le monde qui nous entoure; ils leur préfèrent des idéologies qu'ils se sont inventées, et ils se persuadent trop aisément mais à tort que ceux qui ne partagent pas leurs dogmes, illusions et croyances font de même qu'eux mais en défendant cette fois une idéologie opposée aux leurs. Comme ils s'aveuglent et combien ils se trompent!

A de multiples reprises déjà, sur ce site, j'ai dénoncé la confusion permanente que nos politiciens et nos décisionnaires entretiennent avec une remarquable constance entre, d'une part les difficultés et problèmes psychologiques d'une fraction de la population, et d'autre part les troubles ou "maladies" mentales chroniques d'une fraction pourtant distincte de la première dans cette même population. Cette confusion systématique permet de rassembler en une seule grande famille, pourtant très hétérogène voire hétéroclite, tous les individus défavorisés et inadaptés de notre société, quelle que soit la véritable cause profonde de leur inadaptation, et de les adresser et confier tous indistinctement "aux bons soins" d'organisations et d'administrations "d'assistance" et de "rééducation", de "resocialisation" ou peut-être encore de "bienfaisance" regroupées sous l'étiquette générique de "Santé mentale".

L'illustration de cette politique, telle que préconisée aujourd'hui encore par certains chez nous en Belgique (mais pas seulement en Belgique!), est particulièrement évidente et instructive sur le site web http://www.psychiatries.be/ qui réunit plusieurs associations et "groupements" se présentant sous la dénomination commune de "Mouvement pour une Psychiatrie Démocratique dans le Milieu de Vie" (MPDMV) . Cette appellation est la signature immédiatement évidente (délibérée) de la filiation directe de cet actuel "Mouvement" à partir du mouvement philosophique et idéologique de "démocratie psychiatrique" initié en Italie pendant les années 1950 sous l'impulsion du médecin italien psychiatre, philosophe, sociologue et idéologue Franco Basaglia, mouvement qui aboutit à la promulgation de la "Loi 180" imposant la fermeture des hôpitaux psychiatriques en Italie (cf. http://fr.wikipedia.org/wiki/Franco_Basaglia). Un site correspondant est toujours présent sur la toile (Trieste); il renseigne sur l'historique et la "philosophie" de la santé mentale telle que défendue par Basaglia et ses successeurs d'hier et d'aujourd'hui (on remarquera que bien des références qui y sont citées datent de plusieurs décennies, n'ont plus qu'un intérêt surtout historique et sont dépassées, voire rendues obsolètes et réfutées par nos connaissances actuelles en neurobiologie et en médecine psychiatrique EBM).

J'ai déjà dit ailleurs (Lenteurs) comment sont nées et ont pris corps, dans les années 1950, les idées de "désinstitutionnalisation", et comment l'OMS/WHO, assez naïvement, s'y accrochait encore toujours en 2001 (cf. Casques Bleus?). Ces idées partaient, certes, de bonnes intentions très humanitaires, mais malheureusement elles équivalaient à mettre la charrue bien loin devant les bœufs. En les simplifiant quelque peu, disons qu'elles consistaient à croire que, pour assurer la guérison des malades mentaux, il suffirait de les sortir de leurs institutions hospitalières accusées d'être iatrogènes, mais on n'avait toutefois pas prévu d'aménager au préalable et en nombres suffisants les indispensables lieux d'accueil alternatifs et de remplacement qui demeureraient nécessaires à leur protection une fois qu'ils seraient "remis en liberté" (manifestement, on imaginait qu'ils n'en auraient plus besoin, puisqu'on voulait croire qu'ils ne pourraient qu'être "guéris" du seul fait de leur "libération"!).

Car les idées qui règnaient à propos des "maladies psychiques", n'étaient nourries que des ignorances et des croyances utopistes encore toujours véhiculées par certain philosophisme pseudomédical (et pseudopsychologique) et spéculatif d'alors (et par l'imagination populaire - et "la doxa" - quelque peu mâtinée de pseudo-philosophie New Age et peut-être même de psychanalyse) à quoi se mêlaient superstitions et idées reçues depuis toujours (c.à.d. depuis bien avant et jusqu'à 1950 voire plus tard encore, et persistant même jusqu'à aujourd'hui chez une importante proportion de nos contemporains).

Certains croient à l'existence de l'enfer et en disent qu'il serait pavé de bonnes intentions. Si l'on en juge par les conséquences qu'a entraînées la désinstitutionnalisation qu'un peu partout en occident (en Europe) on a voulu mettre en œuvre depuis une cinquantaine d'années , sans toutefois se doter véritablement du minimum des moyens indispensables que sa mise en place aurait exigés pour la rendre au moins supportable sinon vraiment efficace, sans non plus en planifier rationnellement ni avec discernement ni prudence les modalités pratiques d'application, chacun peut en effet vérifier, non plus cette fois dans l'enfer d'un au-delà mythologique ou de proverbe métaphorique, mais bien dans la réalité quotidienne du "terrain", que les bonnes intentions, en l'absence de réflexion les précédant d'abord pour ensuite les accompagner et peut-être alors les corriger si nécessaire, s'avèrent souvent être à l'origine de trop nombreuses et littéralement infernales détresses humaines aboutissant à l'opposé des buts de bienfaisance annoncés (je me souviens encore aujourd'hui avec émotion des déchirants appels à l'aide lancés dans le cyberespace, au début des années 1990 et dès avant la création du"worldwide web", par un père de malade italien dont le fils schizophrène avait été jeté à la rue à la suite de la fermeture de son institution psychiatrique).

Faut-il donc rappeler une fois de plus qu'avant l'avènement des premiers neuroleptiques, la psychiatrie ne disposait d'aucun moyen thérapeutique permettant de soigner (d'aider) vraiment les malades mentaux chroniques? Si bien que, bien plus encore pour la protection des malades eux-mêmes que pour celle de la "sécurité publique" ou celle de l' "ordre public" (ces deux derniers arguments ou prétextes sont très discutables et bien trop souvent avancés par les idéologues partisans de la "répression sécuritaire"), leurs familles (et la "Société") ne pouvaient que se résigner à confier, bon gré mal gré ces malades à des asiles où censément ils seraient "soignés".

Mais dans les conditions imposées par l'indifférente et impitoyable réalité du monde et de la société qui nous entourent, les "soins", dans ces asiles et en l'absence des indispensables connaissances biologiques et médicales (sur le cerveau), et aussi compte tenu de l'inexistence de moyens thérapeutiques pertinents, en quoi pouvaient-ils consister et à quels pauvres simulacres pouvaient-ils bien se résumer? Le plus souvent, les "soins" n'étaient que le résultat et la mise en application de la seule imagination débridée et des fantasmes plus ou moins morbides des psychiatres de service ainsi que de leurs aides jouant le rôle d'infirmiers devant "dominer" (comprenez: "s'en faire obéir") voire "maîtriser" physiquement des "patients" incohérents en apparence, incompréhensibles, imprévisibles et pour le moins indociles, qui pour ces raisons étaient ressentis comme inquiétants et devenaient parfois (ou souvent) dangereusement hallucinés ou rétifs voire rebelles aux brimades de leurs surveillants et gardiens (mais aussi, ces derniers méritaient-ils toujours la présomption d'infinie patience et de compétence qu'on s'accorde à attribuer en parfaite confiance à de vrais "soignants" professionnels?)

Comment aurait-on pu éviter aussi (et comment s'étonner!) que pareils "asiles" ou hôpitaux psychiatriques ne "dérivent" par routine, laisser aller ou lassitude et négligence, et ne deviennent chacun, plus ou moins rapidement mais inéluctablement, des lieux sordides encourageant le croupissement des malades dont, même si on l'avait ardemment voulu, on ne pouvait parvenir à améliorer l'état mental, faute des moyens matériels thérapeutiques adéquats alors totalement inconnus, et faute du personnel disponible qui aurait d'abord dû être spécialement recruté sur la base de ses compétences, de son désintéressement, de son humanitarisme, de son dévouement et de son empathie, et qui aurait dû être au préalable exempt (ou au moins débarrassé) des habituels préjugés "moraux" voire "religieux" stigmatisants (tous aujourd'hui encore notoirement endémiques dans le grand public). Ces multiples qualités éminemment nécessaires à leur tâche ingrate et fastidieuse, mais qualités rares voire exceptionnelles, surtout en cette occurrence très particulièrement pénible des affections psychiatriques, s'assurait-on systématiquement que les personnels "soignants" recrutés pour ces hôpitaux-là les possédaient en suffisance? (Y veillait-on autant - ou peut-être moins? - que dans les autres hôpitaux "ordinaires", c.-à d. non psychiatriques?)

(Rappelons aussi que, en quelque sorte par tradition, une majorité des institutions hébergeant des malades mentaux étaient, à leurs débuts, placées sous la direction et la responsabilité de congrégations religieuses qui en assuraient le fonctionnement: les "soignants" bénévoles qui s'y dévouaient pensaient sans doute y "mériter et gagner leur paradis").

Alors, confrontés personnellement à la situation réelle des malades mentaux "internés" ou hospitalisés en institutions psychiatriques, les visiteurs réguliers ou même seulement occasionnels de ces lieux, au départ peu ou mal avertis mais à qui on avait promis que les malades y seraient soignés, que découvraient-ils? Ils découvraient une réalité bien différente de celle que les promesses des professionnels leur avaient laissé espérer.

Malgré leur désillusion, ils ont pourtant persévéré à croire que les moyens thérapeutiques promis existaient effectivement (parce qu'ils désiraient à toute force y croire), mais face à la réalité asilaire pour le moins décevante qu'ils pouvaient constater eux-mêmes, ils se sont bien naturellement mis à imaginer que, pour diverses raisons et peut-être aussi d'obscurs profits et trafics supposés mais inavouables, on se plaisait à refuser l'utilisation de ces moyens et à honteusement lésiner sur les frais qu'ils auraient à coup sûr entraînés si on les avait mis effectivement en œuvre (de plus et de tous temps, les professionnels "psys" ont répugné à reconnaître et à "expliquer" au public leur réelle impuissance thérapeutique face aux affections mentales chroniques. Pareille réticence est humaine et assez compréhensible, même si on doit parfois s'interroger pour lui trouver des excuses; car s'ils avaient consenti à admettre leurs ignorances, pourtant légitimes compte tenu du peu de données scientifiques validées et disponibles à l'époque, et s'ils avaient été capables de reconnaître leur impuissance qui ne pouvait qu'inévitablement en découler (et justifier leur apparente passivité), comment auraient-ils pu continuer, à la suite de pareil aveu, de convaincre les proches des "patients" et le public de leur utilité et efficacité thérapeutiques supposées, tant attendues et jusque là acceptées de tous comme allant de soi, et que par ignorance et respect de l'autorité personne n'aurait imaginé et encore moins osé remettre ouvertement en question?)

L'hébergement, les soins, l'hygiène et l'alimentation des malades, les salaires des membres du personnel, les traitements des psychiatres, l'entretien et le chauffage des bâtiments, combien de ressources financières sans doute ne fallait-il pas consacrer à ces différents postes de dépense pour, en fin de compte, ne parvenir qu'à ne pas "guérir" ni même améliorer l'état (et l'aspect!) des pensionnaires, mais bien plutôt pour les laisser se dégrader tout en les torturant en guise de traitements, (pour sans doute [se] donner l'illusion qu'on s'efforçait de les soigner?) Ces constats et conclusions ont sans aucun doute fortement contribué à créer la conviction et à la répandre généralement dans le public mais aussi chez les décideurs, que les "asiles" et hôpitaux psychiatriques étaient tout à la fois déshumanisants (justification faussement humanitariste aujourd'hui toute trouvée - ad hoc - pour faire "accepter" des économies hypothétiques qu'on escompte des fermetures des hôpitaux psychiatriques!) et, en regard des piètres résultats thérapeutiques généralement obtenus sur leurs pensionnaires malades, ils étaient aussi bien trop coûteux et "dévalorisants" à la fois, ternissant l'image des gestionnaires et élus politiques des communes où ils étaient implantés, et alimentant (opportunément?) les préjugés stigmatisants des habitants riverains et des populations locales envers ceux que, par facilité et sans même y vouloir penser, tous ils appellent les "fous".

On peut se féliciter de ce que, depuis lors, les conditions de vie dans les hôpitaux et instituts psychiatriques se sont radicalement améliorées, principalement grâce à la découverte des médicaments "psychotropes". Pourtant, la réputation des hôpitaux psychiatriques est encore toujours l'objet d'une représentation désastreuse dans l'imaginaire des gens en général, car les idées reçues et les opinions - surtout celles qui ont trait au "psychisme" et à "l'âme", mais aussi celles sur l'instruction et sur l'éducation censée distinguer le "Bien" du "Mal" et peut-être enseigner la morale! - ont toujours bénéficié d'une vie particulièrement longue et tenace. Elles persistent souvent pendant plusieurs générations pour finir par ne s'aligner sur l'évolution des mœurs qu'avec grande réticence et avec un retard considérable.

La réputation détestable des institutions psychiatriques (qui ne repose plus aujourd'hui que sur des souvenirs certes fort pénibles qu'il faudrait néanmoins sérieusement réviser) est un prétexte commode pour les politiques et un moyen pour eux, camouflé sous des apparences faussement humanitaires, d'afficher et d'étaler publiquement, essentiellement en paroles et donc à moindres frais, un maximum de témoignages et de déclarations de bons sentiments. De plus, les apparences affichées souvent permettent de dissimuler des motivations socioéconomiques en réalité très intéressées, elles fournissent un alibi pour prêcher, bien plus par idéologie que par rationnalité ou étayées par de véritables preuves, la fermeture des instituts psychiatriques, ces "abominables lieux d'oppression et d'abus de pouvoir" pour lesquels veulent encore toujours les faire passer les apôtres inconditionnels de leur suppression, apôtres plutôt naïfs quoique d'une indubitable et fort louable bonne volonté, mais peut-être mal informés, ou sûrement mal instruits en biologie et en médecine, et aussi sans doute quelque peu manipulés.

J'ai déjà dit ailleurs (v. le dossier sur la schizophrénie: p.60 du fichier .PDF) une des raisons de la répulsion inspirée au public ("profane") par la visite de beaucoup d'hôpitaux psychiatriques: les malades psychiatriques chroniques y sont rassemblés et offrent au visiteur la vue, non pas de l'un ou l'autre malade isolé perdu au milieu de nombreux bien-portants et par conséquent n'attirant pas à première vue l'attention, mais montrent au contraire le regroupement de personnes présentant toutes des "bizarreries" très variées, spectaculaires ou non, dont l'accumulation en un seul lieu peut non seulement inquiéter mais aussi effrayer les visiteurs non prévenus. Ceux-ci ont ainsi l'occasion de voir, au même moment, les multiples et divers aspects que peuvent prendre les manifestations des affections mentales chroniques, ce dont ils ne prendraient jamais clairement conscience s'ils ne faisaient que croiser, un instant et par hasard, l'un seul de ces mêmes malades dans la rue.

D'où aussi prennent spontanément naissance, dans le public, à la fois la réaction instinctive et instantanée de rejet des malades et la conviction intuitive, plutôt irrésistible mais tout à fait fausse, que c'est "l'enfermement en institution psychiatrique" qui est à l'origine de leurs troubles et comportements psychiatriques (voire les aggrave), impressions que des visiteurs compatissants et souvent horrifiés ont décrites à la suite de leurs visites. Les médias s'empressent ensuite de rapporter ces propos en ne manquant surtout pas de donner à leurs récits journalistiques une couleur aussi sombre et sensationnaliste que possible.

Mais aussi, cette fois a contrario si on peut s'exprimer ainsi, c'est le même processus psychologique, se déroulant cette fois en sens inverse, qui semble justifier la croyance que supprimer les hôpitaux et instituts psychiatriques résoudrait le "problème des malades psychiatriques", en prétendant les réintégrer dans le "milieu normal de vie". Ainsi dispersés dans la foule des bien-portants, les malades mentaux chroniques peuvent en effet sembler disparaître de la vue de ceux qui ne veulent en fait pas les voir. Cela permet[trait] à certains optimistes et impénitents praticiens de la méthode Coué de se persuader que, puisque ces malades ont en effet disparu de leur horizon de myopes volontaires, ils pourraient affecter de croire eux-mêmes et laisser croire aux autres qu'il n'y a plus de malades psychiatriques, donc qu'ils ont été [bien?] soignés et peut-être même qu'ils ont été guéris.
Par conséquent, n'hésitons pas à fermer, sinon tous les hôpitaux psychiatriques, du moins le plus grand nombre possible et, dans la foulée, affirmons hautement que c'est le moyen tout à la fois le moins onéreux et le plus expéditif permettant de guérir un maximum de malades mentaux (par ce qu'il faut bien appeler, de la part de ceux qui savent ce qu'il en est réellement de l'efficacité thérapeutique de la psychiatrie, un tour de passe-passe d'une honnêteté intellectuelle pour le moins discutable, n'est-il pas vrai?).

En Belgique, les membres du MPDMV font partie de ceux qui militent pour la fermeture des hôpitaux psychiatriques. Ils disent (voyez www.psychiatries.be) se baser sur les déclarations de l'OMS, sur "les 25 ans d'expérience de l'Unité psychiatrique intégrée de Liège" (sic) et sur des "expériences internationales" de diverses organisations et associations regroupées dans une sorte d'alliance multinationale dont le cyberlien figure ici (www.imhcn.org) parmi ceux de plusieurs autres sites auxquels lui-même il renvoie (et que donc cette alliance n'hésite pas à cautionner!). Ceux-ci affichent tous, entre autres objectifs divers, une même volonté: celle de supprimer les hôpitaux psychiatriques et de "briser" ce qu'ils appellent "la domination du paradigme médical" (voyez ici)... Parmi ces organisations et associations, certaines (heureusement pas de chez nous!) vont même nettement plus loin sur ce chemin: elles encouragent (avec une dangereuse inconscience et de façon fort peu responsable!) des "thérapies alternatives" plus ou moins ésotériques et farfelues, voire à la limite magiques, qui selon leurs dirigeant[e]s (parfois quelque peu illuminé(e)s sans doute), dispenseraient avantageusement de recourir aux médications psychotropes qu'elles qualifient de toxiques et dangereuses et qui, paraît-il, entretiendraient même les maladies mentales plus qu'elles ne leur apporteraient de soulagement (Adélaïde), ou encore suggèrent des procédés dits "naturels" et "alternatifs" à mettre en œuvre pour abandonner les traitements par neuroleptiques et pour avantageusement s'en passer (comingoff).

Elles dénoncent, condamnent et veulent aussi proscrire les hospitalisations et traitements sous contrainte (freedom), ce qui démontre que leurs membres semblent n'avoir pas encore appris l'existence ni par conséquent compris tous les dangers, ni les méfaits de l'anosognosie des psychotiques, qui aujourd'hui sont pourtant des constats connus et établis de longue date (mais d'où donc tirent-ils leur expertise et leurs savoirs, les "experts" qui conseillent ces associations?)

On ne peut s'empêcher de ressentir une sorte de fascination quelque peu mêlée d'incrédulité et de malaise, face à l'incohérence et à la mémoire défaillante et sélective - je veux croire cette dernière involontaire et de bonne foi - de la plupart de ces associations et groupements par ailleurs et à coup sûr pleins d'excellentes intentions. Ainsi, les "psychologues", après avoir pendant des décennies (et même assez souvent aujourd'hui encore!) hurlé avec les loups accusant les familles et les parents , la société, le "milieu de vie" et tutti quanti, tous "psychogènes!", d'être responsables des maladies mentales qui frappent les personnes, aujourd'hui leur discours a pris le contre-pied de leurs précédentes professions de foi: désormais, bien qu'ils accusent les traitements neuroleptiques d'être inefficaces et même dangereux et néfastes (puisqu'ils ne guérissent pas les personnes malades alors qu'on les prescrit et les administre ["sous la pression des lobbies pharmaceutiques"!] dans ces sinistres hôpitaux psychiatriques), ils affirment qu'il faut sortir ces personnes des hôpitaux iatrogènes qu'on doit fermer, ils répètent qu'on doit les délivrer du "paradigme médical" et, bien qu'elles ne soient pas guéries, ils veulent les renvoyer dans ce "milieu de vie" parce qu'il leur est paraît-il familier et ils veulent imaginer qu'elles languissent d'y retourner "pour y retrouver l'exercice de leurs droits et leur dignité"; mais ce "milieu de vie-là", c'est pourtant bien aussi celui qui, censément, les avait auparavant rendues malades, et aussi c'est cette "maladie" qui, précisément, avait justifié et notoirement rendue nécessaire leur hospitalisation pour diagnostic et traitement (ce que certains semblent n'avoir pas retenu de ce qu'ils étaient pourtant censés avoir appris de leur expérience tant vantée [?] parce que longuement acquise "sur le terrain").

Quand ces "mouvements" pour la "désinstitutionnalisation" dénigrent injustement les hôpitaux psychiatriques, aussitôt la presse s'empare de la "nouvelle" et les journaux publient à leur tour des articles aux titres vengeurs, du genre "Encore toujours trop de lits dans les hôpitaux psychiatriques"! On oublie de citer les autres périodiques locaux à moindre diffusion, qui très justement dénoncent la pénurie d'institutions!
Souhaitons donc aux journalistes de ne jamais compter parmi leurs proches de malade mental psychotique chronique qu'ils tentent de faire hospitaliser: ils risqueraient de devoir radicalement revoir leurs opinions sur le sujet et de devoir corriger leurs copies!

Je continue pourtant de croire qu'aujourd'hui encore, c'est dans les hôpitaux psychiatriques qu'on peut [pourrait?] disposer des meilleurs moyens de faire le diagnostic correct des affections psychotiques chroniques: parce que, à la différence des petites structures dont les équipes réduites au personnel changeant à tour de rôle, fréquemment ne travaillent que sur rendez-vous et par brèves consultations, à la manière de dispensaires, les hôpitaux par contre permettent de garder et d'observer de présumés ou avérés malades, en permanence par les mêmes "soignants" et pendant des périodes de durées suffisantes indispensables pour:

SUITE et FIN de l'article IDÉOLOGIES


Première publication: 12 Mars 2012 (J.D.) Dernière modification: 12 Mars 2012

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