Cette page est reprise de l'ancien site de la région wallonne.

Depuis l'été 2004, le contenu de cette page n'est plus accessible,
c'est pourquoi nous la diffusons ici telle qu'on pouvait la lire à l'adresse
http://detienne.wallonie.be/terrdis/dis15.html

Discours de M. Detienne (alors ministre de la santé de la région wallonne)

   
Inauguration offcielle de l'Institut wallon de Santé mentale

10 octobre 2002
 
 
Mesdames, Messieurs,

Comme vous le savez tous, le 10 octobre 2002 est la Journée Mondiale de la Santé Mentale. Cette journée marquera l'inauguration officielle de l'Institut Wallon pour la Santé Mentale, né le 29 avril dernier. C'est avec plaisir que j'ai accepté d'être parmi vous aujourd'hui à cette occasion.

Suite à une rencontre avec Paul Jacques, Christiane Bontemps et d'autres promoteurs j'ai, dès le départ, exprimé mon plein soutien à l'initiative qui a aujourd'hui abouti. J'ai en effet souhaité de cette manière que le secteur wallon de la santé mentale puisse avoir les moyens de s'organiser, de se coordonner et de se concerter avec une grande autonomie pour « penser » la santé mentale en Région Wallonne, pour conseiller les Pouvoirs publics, pour représenter auprès de ceux-ci-ci les intérêts du secteur ou pour informer et sensibiliser tant le grand public que les intervenants et les responsables politiques. En tant qu'observateur des pratiques, l' Institut Wallon devient une interface précieuse entre le terrain et les pouvoirs publiques, entre ceux-ci et le grand public

Permettez-moi un petit détour institutionnel qui précise le cadre dans lequel l'Institut Wallon s'inscrit : un état fédéral avec différents niveaux de pouvoir et de compétences qui touchent l'organisation des soins de santé (mentale).

Une des difficultés que nous rencontrons dans le cadre politique, c'est de trouver la cohérence la plus fine entre les différents niveaux de pouvoir et de compétences. Certaines compétences de la prise en charge des soins de santé se situent au niveau fédéral comme la programmation et le financement, d'autres au niveau régional comme l'organisation des soins de santé et d'autres encore au niveau communautaire comme la promotion de la santé. La réalité est en fait plus complexe.

La recherche de cette cohérence est pour nous une priorité. L'Institut Wallon – qui est composé de manière plurielle et représentative de l'ensemble du secteur wallon - devrait à ce niveau constituer pour la Région wallonne un fameux allié et relais de terrain. A ce niveau, l'Institut Wallon devrait permettre de contribuer à nous ouvrir des perspectives tout à fait neuves en Région wallonne.

Une structuration forte du secteur est indispensable pour que les spécificités et les besoins de la population wallonne puissent être pris en compte dans les politiques wallonnes mais aussi dans tous les lieux de concertation avec l'Etat fédéral.

Ma collègue, la Ministre Magda AELVOET, avait annoncé dans sa note de politique relative aux soins de santé mentale de mars 2001 sa nouvelle vision pour le renouvellement des soins en santé mentale. Il s'agit d'un plan ambitieux à long terme (pour les dix années à venir) qui est fondé sur une conception et sur des valeurs que je partage. Mais il reste beaucoup à faire pour donner plus de cohérence et de clarté dans la mise en place de cette politique. C'est pourquoi nous avons souhaité avec mes collègues établir un protocole d'accord de coopération pour la mise en place des réseaux de soins. D'abord pour les jeunes, ensuite pour les autres publics. Nous y travaillons pour l'instant. J'attends à ce niveau là des propositions de l'Institut Wallon. J'ai d'ailleurs demandé à mon département de réunir dans les semaines à venir un groupe de travail dans lequel l'Institut Wallon sera invité.

L'éventail des soins s'est élargi au fil des ans. Ces soins sont variés, notamment par l'intensité et la nature du traitement, le public cible et le contact avec les services. On peut distinguer trois grands types d'approche :

- Le traitement ambulatoire où le patient ne séjourne pas dans l'institution qui administre le traitement et peut même parfois rester à domicile ;
- Le traitement transmuros où le patient est admis temporairement dans une institution, où y réside de manière semi-autonome ;
- Le traitement intra-muros où le patient séjourne jour et nuit dans l'institution.

C'est ainsi que le paysage institutionnel de la santé mentale peut globalement se décliner au travers des services suivants :

Les hôpitaux psychiatriques, les services psychiatriques dans les hôpitaux généraux, les maisons de soins psychiatriques, les initiatives d'habitations protégées, les centres de rééducation avec convention INAMI, l'aide médicale à domicile, les centres de santé mentale, les soins psychiatriques à domicile, les cabinets privés.

Malgré l'offre très importante spécifique, on observe un développement de certaines situations dont les pouvoirs publics doivent faire l'analyse pour en tirer des actions les plus judicieuses. Dans certaines régions, l'admission des malades psychiques se fait aussi ailleurs que dans les lieux spécialisés. Dans ces régions, certains patients psychiatriques sont admis dans des hôpitaux qui ne disposent pas de services psychiatriques agréés. Le psychiatre dispose de quelques lits notamment dans le service de médecine interne ou dans un service d'orthopédie. Pour d'autres raisons, d'autres patients sont admis dans des institutions qui ne conviennent pas à des malades psychiques, notamment dans des maisons de repos pour personnes âgées, des maisons de repos et de soins et des instituts médico-pédagogiques. Ce ne sont que quelques exemples dont les pouvoirs publics doivent faire l'analyse car s'ils veulent que le patient soit réellement au centre du débat, il faut qu'ils comprennent ce type d'émergences du terrain.

L'analyse des besoins émergeants, de la demande (cachée), de certaines priorités me portent à retenir trois grands axes dans la politique de la santé mentale en Région wallonne

1) Les rapports entre l'exclusion sociale et la santé mentale
2) Le travail de l'urgence et la santé mentale
3) L'intégration dans le réseau des services de santé mentale

Le cadastre que j'ai demandé à la Ligue Wallonne de Santé Mentale de réaliser cette année montre également que certains publics méritent une attention tout particulière : c'est le cas bien entendu des jeunes mais aussi des personnes âgées. Le cadastre a montré que la fréquentation des personnes âgées dans les Services de Santé Mentale est extrêmement faible (2% pour les + de 60 ans). Les personnes âgées, de plus en plus nombreuses, n'auraient-elles pas de besoin ? On sait qu'il s'agit pourtant d'une population vulnérable au trouble dépressif , à la solitude, à la maltraitance, même au suicide, etc.

A tous ces niveaux, l'Institut Wallon pour la Santé Mentale devrait contribuer à nous fournir un éclairage et à alimenter notre réflexion.

Les missions que l'Institut Wallon s'est donné et pour lesquels je compte le reconnaître devraient lui permettre d'assumer la place centrale qu'il occupera dans le secteur wallon de la santé mentale.

L'une des trois missions principales de l'Institut Wallon pour la Santé Mentale sera la recherche et l'épidémiologie. A ce titre, outre tout ce que je viens de dire, j'attends de l'Institut Wallon qu'il collabore utilement avec mon administration dans l'évaluation des informations et des données anonymes à caractère épidémiologique relatif aux SSM, ainsi que dans les recommandations qu'il en résultera. La mise au point d'une méthodologie et d'un programme d'analyse des données va bientôt se finaliser. J'ai demandé à mon administration de réfléchir aux moyens d'opérationnaliser celui-ci et de voir quelle collaboration avec l'Institut Wallon pour la Santé Mentale pourrait s'envisager et selon quelles modalités ?

La deuxième mission de l'Institut Wallon concerne la formation. Plutôt que d'être un organisme de formation supplémentaire, j'attends à ce niveau que l'Institut Wallon soit avant tout un organisme de coordination et de stimulation des formations, une interface active et anticipative entre l'offre et la demande.

L'information et la sensibilisation, orienté tant vers le grand public que vers les intervenants et les responsables politiques, est la troisième mission que se donne l'Institut. Il s'agit surtout ici de coordonner, de centraliser et d'impulser, voire d'innover et de donner un plus.

Vous en conviendrez ces missions supposent un soutien significatif du gouvernement wallon et des garanties de subsidiation ont été données.

Pour conclure, je voudrais rappeler les objectifs politiques que je me suis assignés avec mon équipe et que nous souhaitons trouver au cœur des synergies avec le nouvel l'Institut Wallon.

Le concept de « santé mentale » vise un bien-être de l'être humain dans sa globalité somatique et « psychique ». Il dépasse par conséquent les notions de psychopathologie et de psychiatrie auxquelles il est souvent associé et qui sont mal connues par la population.

Ma politique se situe en amont de ces questions descriptives lorsque nous soutenons des projets qui responsabilisent la personne blessée psychiquement au même titre que le clinicien, l'intervenant social ou l'éducateur qui les accompagnent. Toutes les parties ayant à mobiliser des ressources spécifiques pour faire chemin et construire des solutions nouvelles.

Mon attention se porte :

- L'importance de l'action in-vivo pour une intervention efficace qui tienne compte du milieu de vie des personnes en recherche de mieux-être, (par ex : en augmentant l'accessibilité, etc…)
- L'activation du réseau naturel ;
- La mise en place d'une synergie qui puisse optimaliser le réseau des soins à partir des besoins du patient et non des facilités institutionnelles en placant la personne à aider, le patient, au centre des pratiques, de la réflexion et de la politique ; (réseaux divers, clinique de la concertation, réforme des soins de première ligne qui mobilise les acteurs de terrain, décret toxicomanie, …)

Vous le voyez beaucoup de travail reste à faire ! La création de l'Institut Wallon représente pour le gouvernement wallon et pour l'ensemble du secteur une nouvelle occasion de fédérer les synergies pour mieux envisager l'avenir.

Je remercie toutes les personnes qui donneront vie à l'Institut Wallon pour la Santé Mentale en m'engageant pour ma part à en faire une interlocuteur privilégié dans la foulée des collaborations menées avec la ligue wallonne pour la Santé Mentale.