Q3 - De nombreux parents s'inquiètent de l'influence possible des "drogues" sur l'apparition d'une maladie mentale ou sur son évolution. Que peut-on en dire?

On se limitera ici à l'essentiel, c'est-à-dire au bon sens accessible à tous, ce qui permettra aussi de rester bref.
En ce qui concerne les "drogues" socialement admises (tabac, alcool) ou plus ou moins en passe de le devenir (cannabis), nous savons tous que, en dépit des dénégations de certains, leur usage régulier et prolongé augmente les risques d'y développer une dépendance plus ou moins marquée, même chez les consommateurs au départ exempts de maladie mentale; nous savons aussi que cet usage prolongé augmente les risques de développer ou d'aggraver des affections physiques telles que cancers, diabète, troubles cardio-vasculaires et pulmonaires, etc.

En ce qui concerne les drogues plus "dures" (morphine, héroïne, cocaïne, crack, extasy, etc., etc.), on reconnaît généralement dénombrer, parmi leurs consommateurs, un nombre de personnes souffrant de troubles psychotiques plus élevé que dans le restant de la population.

Il est souvent difficile de décider "qui a commencé": si c'est la drogue qui a favorisé l'éclosion de la psychose, ou bien si c'est cette dernière qui a incité à la consommation de drogue. Dans la pratique, du point de vue des parents, des proches et des soignants, on pourrait considérer qu'il s'agit d'une question académique. En effet, ces drogues, déjà nocives pour des personnes bien portantes au départ, ne peuvent que compliquer les troubles mentaux des malades qui s'y adonnent. De plus, leurs effets et séquelles s'ajoutent à ces troubles mentaux et en contrarient souvent le traitement. Ils détournent aussi plus sûrement encore l'attention de tous pour l'hygiène et les soins médicaux, tant "somatiques" que "psychiatriques" que la maladie mentale fait déjà négliger par la plupart de ces malades.

Toutes ces substances devraient donc, en principe, être proscrites aux malades mentaux chroniques.
Bien que raisonnable, cette conclusion risque cependant fort de rester un voeu pieux: au nom des "Droits de l'Homme", qui oserait, par exemple, imposer et mettre en oeuvre un régime d'interdiction stricte du tabac, qui ne serait d'ailleurs réalisable qu'en hôpital psychiatrique devenu, cette fois, vraiment "carcéral"?

Depuis la première rédaction de cette réponse, une importante étude publiée en 2004 (Henquet,C. & al., BMJ, doi:101136/bmj.38267.664086.63) portant sur 2436 adolescents et jeunes adultes de 14 à 24 ans a montré que la consommation de cannabis accroît d'autant plus significativement les risques de développer ensuite une psychose que ces risques sont plus élevés au départ, mais cette influence se constate aussi chez ceux qui n'étaient aucunement prédisposés à développer une psychose. La sévérité de l'affection semble positivement corrélée avec la fréquence et l'importance des doses consommées.
D'autre part, la prédisposition à développer une psychose ne constituait pas, en elle-même, un risque de passer, plus tard, à la consommation de cannabis.
Une autre étude, plus récente encore, menée en Nouvelle Zélande, portant sur 1265 personnes (635 hommes, 630 femmes) depuis leur naissance jusqu'à 25 ans confirme ces observations et montre aussi que c'est la consommation de cannabis qui accroît les risques de développer une psychose, ce ne sont pas les symptômes de psychose qui inciteraient secondairement à la consommation de cannabis" (D.M. Ferguson & al., Addiction 100 (3), p.354, 2005).
Conclusion évidente: l'abstention est fortement recommandée; vous êtes prévenu(e)s.


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